Ses iris bruns parcourent la photographie/carton d’invitation qu’il a entre ses mains. Clairement la photo n’est pas la meilleure d’entre toutes celles qu’il a déjà vues, mais elle est franchement loin d’être mauvaise. Est-ce le même artiste que celui qui figure sur le côté droit du corridor qu’il arpente présentement? Si c’était le cas, c’était une nette amélioration de son travail, sinon il se demande bien pourquoi on lui a envoyé une telle invitation. Quoique. Il n’a qu’à pivoter sur ses pieds pour se retrouver face au mur gauche et voir ses proches photographies affichées sur le mur. Parfois plus récentes, parfois plus anciennes. Le temps de quelques secondes, une crainte persiste quand même dans son esprit à se demander s’il a en possession les autorisations pour partager ces photos. Il ne manquerait plus qu’il lui en manque une et qu’on le poursuivre pour publication sans autorisation. De quoi mettre sa carrière en péril et rapidement à part de ça. Dans tous les cas, bien que ce soit absolument flatteur qu’on expose son œuvre dans ce musée, il ne comprend pas exactement où ils ont pu se les procurer. Est-ce que quelqu’un a piraté son ordinateur pour se procurer les fichiers? Si c’est le cas, c’est tout de même inquiétant et il allait devoir remédier à la situation.

Dans l’ensemble, malgré que ça ne devrait pas se retrouver ici, Il est quand même fier qu’on ait pris ses œuvres à montrer au public. Il le sait, il ne devrait pas ȩtre heureux, on ne lui a jamais demander son consentement pour cet affichage. Mais deux choix se présentaient à lui. Être enragé totalement pour ça ou juste profiter d’un coup de publicité. Parce que s’il regarde dans l’ensemble, ça ne semblait pas être des projets qui allaient sortir prochainement pour une publicité quelconque, donc techniquement, il n’était pas en tord non?

En inspectant bien le côté qui contenait ses propres photographies, il ne peut s'empêcher de tendre un peu l’oreille pour entendre les quelques commentaires chuchotés à voix basse. Ils sont un petit peu difficiles à saisir, peut-être devrait-il s’approcher un tout petit peu plus pour pouvoir les entendre et les comprendre. Après tout, les gens avaient peut-être des commentaires constructifs à lui donner concernant son art, son métier.

Son regard en revient à ce qu’il tient dans ses mains, soit ce fameux carton d’invitation. Il avait hésité un bon moment avant de venir, sachant pas exactement pourquoi et surtout à quoi est-ce qu’on l’invitait, le carton étant relativement vide de toutes informations autre que ce D et l’indication “Trouve-moi.” Mais qui était D? À peu de chose près on pouvait se sentir comme dans Men in black avec ses agents qui ne sont nommés que par une seule lettre. Il inspire lentement, profondément en inclinant doucement la photographie pour faire scintiller le D sous les effets de la lumière. C’est intriguant. Sur qui tombera-t-il? Néanmoins il soupire. “Comment je vais faire pour te trouver toi en travers une galerie… et surtout sans savoir si tu viendras tout simplement…”

Se tordant un peu le cou au lieu de se retourner, il fixe la droite et les clichés accrochés au mur. Serait-ce cet artiste-là? Est-ce que c’était D ou c’était simplement quelqu’un d’autre?

Il s’approche d’une en particulier qui est épinglée au mur, l’observe attentivement. Sans qu’il ne le veuille vraiment, sa tête s’incline doucement, mouvement totalement involontaire lorsqu’il analyse quelque chose, croisant ses bras en faisant attention de ne pas froisser la photographie qui au final repose contre ses côtes, face photographiée visible vers l’extérieur.

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( Pando )

Des cartons d’invitations, tu en avais reçu des dizaines. Souvent pour des soirées undergrounds. Souvent pour des choses reliées au Soleil Noir. Alors, lorsque tu reçois celle-ci, tu ne réfléchis même pas plus loin. Tu tilts à peine sur l’étrangeté de la photo, sur le lieu de rendez-vous, et tu te dis juste que ton nouveau client a des goûts un peu douteux. C’est probablement un vieux bourge qui aime passer son temps au musé, à discuter des heures sur le dernier tableau en vogue dont tu te fous complètement mais que tu feras semblant d’aimer pour la bonne cause. Tant qu’il a de l’argent à claquer pour tes beaux yeux, tu veux bien jouer la carte de la branlette intellectuelle toute l’après midi s’il le faut. Alors tu t’apprêtes, avec une certaine classe vu l’endroit, et tu t’attends simplement à un petit jeu de piste avant de pouvoir entrer en scène. Quelque chose de facile. Peut-être d’un peu amusant, pour changer. Mais lorsque tu longes les couloirs du musé, ton visage se décompose un peu, tes pas ralentissent, ton coeur tambourine plus fort encore contre ta cage thoracique. Ces photos… Celles à ta droite te sont étrangères, mais les autres, tu ne les connais que trop bien. C’est les tiennes. Et pas n’importe lesquelles. Celles que tu ne montres jamais.

Avec ton travail, des photos, tu en as pris des tonnes. Des photos souvent osées, parfois complètement indécentes. Mais celles qui sont affichées, elles, représentent bien plus à tes yeux. Aucun nu, aucun bout de peau obscène, juste des endroits souvent défraîchis, des instants volés du ZEN, des bicoques bordéliques et crasseuses, à moitié ravagé par la pauvreté et l'orgueil des hommes. Certaines sont vieilles et datent de ta première pellicule que tu pensais avoir perdu, quand d’autres sont toutes récentes.

Tu avales difficilement ta salive, perdu, alors que ton regards parcours les couloirs, alors que tu cherches quelque chose sans trop savoir quoi, alors que certains murmures s’élèvent sans que tu réussisses à comprendre ce qu’il se dit autour de toi. Les passants regardent un côté, puis l’autre. Et toi aussi tu t’y intéresses un peu. Tu vois la beauté dans chacun de ses clichés, là où les tiens te semble presque ridiculement pauvre, en face. Est-ce que c’est lui, A ? Ou est-ce que quelqu’un a décidé de vous piéger tout les deux ? Tes pas se font plus lent lorsque tes yeux observent à nouveau les alentours. Comment le trouver ? Comment réussir à avoir des explications sur ce qui est en train de se passer ? Tu n’es même pas sûre d’être en colère, en fond. Tu es curieuse de savoir ce que les gens en pensent, de ces photos, mais tu es probablement trop craintive pour vraiment écouter leur réflexion. Ça te sort un peu trop de ta zone de confort. Et tu détestes ça.

Tes yeux finissent enfin par agripper une silhouette. Là où tu n’y aurais accordé aucun intérêt à l’ordinaire, c’est la petite carte qui dépasse de ses bras croisés qui t’interpelle. Tes talons claquent avec une fausse assurance jusqu’à lui, alors que tes doigts arrachent la dite carte de son emprise sans un mot, sans un bonjour, sans un merci non plus. Tu la retourne, tu regardes, tu hurles presque intérieurement de savoir qu’entre toutes, c’est celle là qu’A a reçu. Sa carte est dans le même ton que la tienne. Probablement qu’il n’est pas coupable alors. « A ? C’est toi, non ? » Tu relèves enfin les yeux vers lui pour lui adresser la parole, presque trop dur pour la cause, alors que tu lui tends ta propre carte en guise de présentation. « Je peux savoir ce que c’est que ces conneries ? » Ta voix se veut autoritaire, mais au final, elle n’est qu’incertaine, presque craintive. Surtout perdu, en fait. Comme toi.

Spoiler:

( Pando )

La surprise marque ses traits quand il sent qu’on lui retire le carton d’invitation sans même une once de douceur. Mais qu’est-ce qui se passe? Axel se retourne vivement vers l’endroit où pendait le carton quelques secondes plus tôt pour y découvrir une jeune femme qui observe l’invitation. Eh allo? S’il n’avait pas été aussi poli qu’il ne l’est tout le temps, il lui aurait peut-être fait savoir que ce n’était pas très poli et gentil de faire un geste tel que celui dont elle venait de poser. Mais en même temps, il est rare qu’on réussisse à éduquer un adulte sur les bonnes manières en public. Il pousse un petit soupir alors qu’il ne décroise même pas les bras, mais qu’une petite pointe d’irritabilité se note sur son visage. C’est un peu le genre de comportement qui l’exècre de l’espèce humaine par moment.

Nouvelle surprise, elle ouvre finalement la bouche pour daigner lui dire quelque chose. Ce n’est pas du tout ce à quoi il s’attendait, mais c’est un début. Par contre, il est perdu. A? “J’im…” Elle lui tend un carton, mais pas celui qu’elle lui a volé. S’en est un autre qui affiche une photo qu’il reconnaîtrait entre mille. L’une de ses premières photos qu’il n’a jamais prises. Il n’avait jamais été totalement fier du résultat, mais le jeu des lumières lui avait donné un aspect particulier. Rien que pour ça, il ne s’était jamais résigné à la supprimer. D’un autre côté, elle lui montrait d’où il partait et tout le chemin qu’il avait parcouru pour se rendre à certains clichés affichés sur le mur de gauche.

Cette nouvelle fois qu’elle ouvre la bouche est guère plus agréable que la première, Axel lève les yeux au ciel en réprimant un nouveau soupir dans sa gorge. Franchement. “Donc j’imagine que tu es D…” Il se retient d’ajouter un ton un peu condescendant, restant totalement neutre dans son timbre de voix. “J’aimerais tout autant que toi le savoir, mais tu pourrais au moins faire l’effort de ne pas être aussi autoritaire quand tu me parles. Je ne sais pas plus que toi ce qui se passe et tout ce que j’ai reçu dans ma boîte aux lettres ce matin est ce que tu tiens dans ta main.” Si d’ordinaire, il aurait pris le temps de la vouvoyer pour être poli, il n’en éprouve pas particulièrement l’envie vu la façon dont elle l’a approché de prime abord. Son regard observe encore un peu ce phénomène particulier qui se trouve devant lui avant de retourner à la contemplation du carton de la demoiselle dans ses propres mains. Il observe la photo, retourne le carton pour voir les caractères, mais il n’y a rien de plus que ce qu’il connaissait déjà. La seule différence, la lettre sur le devant.

Dans tous les cas, si c’était une blague, s’en était une très mauvaise. Mais Axel était beaucoup plus absorbé à tenter de déterminer pourquoi est-ce qu’on voulait qu’ils se rencontrent? Oui, ils faisaient tous deux de la photographie et ils étaient tous les deux affichés à cet instant même dans cette galerie d’arts. Il se gratte un peu le menton en réfléchissant. “Ils ont demandé tes photos ou ils ont fait comme avec les miennes? Ils les ont prises et m’ont envoyé le carton après.” Par chance, ce n’était pas les photos boudoirs, il doutait fortement que ses clients auraient apprécié se retrouver afficher sur ce mur d’une telle façon et ce, même si les photos sont absolument magnifiques. “Peut-être qu’on devrait essayer de trouver un employé de la galerie. On aurait peut-être des informations supplémentaires.” Qui sait? C’était toujours mieux que de tourner en rond. Il fallait un point de départ et c’était peut-être celui-là.

Il relève son regard sur elle, l’observe quelques secondes avant de s’attendre à une attitude fort peu appréciable, mais il se risque tout de même. “Cette photo…” Il pointe celle qu’elle a dans les mains, qu’elle lui a récupéré de force des mains alors qu’il lui aurait volontiers donné si elle le lui avait demandé. “Ça fait un moment qu’elle a été prise non?” Parce que s’il la compare avec celles affichées, il voit bien qu’elles sont plus travaillées, plus précises, à peu près comme n’importe qui qui pratique un peu la photographie. Ça nécessite un entraînement en soi. “Parce que sinon tu as fait un progrès remarquable en peu de temps! Mais même si tu l’as fait sur un bon laps de temps, ça reste vraiment réussi!” Parce qu’il sait reconnaître le talent chez les gens, il faut au moins lui reconnaître cela. Sans compter qu’il est pour que tous puissent s’essayer et s’améliorer dans son art. Tous méritent une chance.

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( Pando )